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  • Photo du rédacteurMicheline PACE

Rêveries impressionnistes dans le sillon de la Creuse Mai 2019

Dernière mise à jour : 22 oct. 2021


La Creuse, la belle inconnue


Une terre d’itinérance à la lisère entre langue d’Oc et langue d’Oïl au cœur d’une nature sauvage s’ouvre au fil de rivières torrentueuses et d’éboulis rocheux : la Vallée des peintres. Formidable écrin pour les peintres impressionnistes qui s’y sont succédé suite à une injonction de George Sand, véritable ambassadrice des lieux, qui s’y rendait en villégiature, jusqu’à sa résidence secondaire de Gargilesse, emmenant Chopin dans son sillage, notamment en face de la forteresse de Crozant, place forte de la France médiévale, hissée sur un promontoire rocheux. Qualifiée de petite Suisse berrichonne par l’écrivaine, le territoire de la Creuse a connu un destin en demi-teinte jusqu’à être ressuscitée aujourd’hui après un long oubli. Du fleuve éponyme, elle dira : « La Creuse est peut-être la plus belle rivière au monde (..) Elle dessine de grandes courbes immobiles et transparentes dans de hautes coupures taillées en amphithéâtre (…) ». Ce décor romantique autant que bucolique offre un point de vue insolite sur le rocher de la Fileuse qu’on imagine aisément séduire les amoureux du pinceau.


En plein milieu de l’hexagone, cette zone de contact entre le bassin parisien et le massif central, résultante de chocs et fractures causés par d’impérieux mouvements tectoniques apparaît telle « une miniature fidèle du paysagisme moderne », selon la formule consacrée de l’historien de l’art, Christophe Rameix.

Région idéale pour peindre sur le motif grâce aux nuances variées de ses coteaux et de ses fameuses bruyères roses, ses fonds rapprochés et ses vallées ni trop hautes ni trop larges, elle s’est enrichie de sentiers d’interprétations qui vous refont revivre les visions illustrées dans les tableaux des Impressionnistes.

Deux axes se dessinent : Crozant pour Guillaumin et Picabia, Fresselines pour Monet, dont on commémore les 130 ans de sa disparition en cette année 2019. N’ayant rien perdu de son mystère ni de son charme, peuplée encore par le fantôme de la dame de Nohant, elle abrite l’école de Crozant, désormais aussi importante que celle de Pont-Aven ou de Barbizon, magnifiquement mise en exergue par le Centre d’art Monet-Rollinat ouvert en 2018. « Toujours même temps sombre et pluvieux ! », s’exclamait Monet en avril 1889 ; c’est pourtant ce climat-là qui lui fit produire sa première série de dix toiles dont la vivacité des couleurs est saisissante.


Si les artistes pleinairistes ont trouvé leur bonheur dans ce site époustouflant, qui se prête naturellement et logiquement à la contemplation par « la tranquillité d’une rue de village, à un bord de rivière, à quelques arbres dans un verger », selon Christophe Rameix, c’est aussi parce qu’il recèle une biodiversité inédite valorisée et protégée par des labels officiels : couverts forestiers rassemblant hêtres à houx, tilleuls et érables ; il abrite ainsi une faune riche en espèces (loutre, moule perlière d’eau douce, chauve-souris et une petite libellule appelée Aprion de Mereuse). De ces terres difficilement cultivables mais très agréables à serpenter de nos jours, fleurissent des pâturages communs pour des troupeaux d’animaux dont on peut admirer entre autres les belles rousses (vaches limousines au pelage flamboyant réputées en gastronomie).

Sur leurs traces, on refait le voyage pictural en reconnaissance des endroits où ils ont posé leur chevalet. En témoigne à la confluence des rivières La Sédelle et La Creuse, l’atmosphère perçue par le grand maître des Eaux semblantes, du Ravin de la Creuse ciel gris ou au déclin du jour, un peu plus loin, Le pont de Vervy et son illustre moulin ... bien que ce paysage rude n'existe plus en tant que tel, laissant la place à une végétation luxuriante. Car « l’art véritable n’a que faire des proclamations et s’accomplit dans le silence », selon les propres termes de Proust, admirateur sans bornes de Monet.

Auberge de la Vallée


Mais avant de quitter le Crozant, il faut impérativement faire une halte gastronomique à l’Auberge de la Vallée, sur ce chemin de St-Jacques de Compostèle ; la maison de caractère avec ses trois salles aux couleurs chatoyantes dirigée d’une main de maître par le chef Sébastien Proux, qui a aimé travailler en Suisse également, incarne une cuisine locale de renom privilégiant les produits du terroir comme par exemple l’autruche de Sagnat, le bœuf du limousin, les brasseurs du coin, le safran de St-Blaise apprêtés en menu au nom évocateur Promenade.

Le Centre d’art, espace Monet-Rollinat,

dirigé par Pierre Veysseix, est un nouveau musée interactif fort intéressant (2, allée Fernand-Maillaud, 23 Fresselines. Tlj 14h-18h jusqu’au 30 juin et en oct. ; 10h30-12h30 et 13h30-19h de juillet à août). On y découvre parallèlement une pépinière de travaux des protagonistes contemporains férus d’arts plastiques, sonores, graphiques, musicaux ainsi qu’une boutique beaux-arts et une librairie point info.

Hôtel Lépinat - centre d'interprétation du patrimoine

Cette ancienne auberge où séjournaient les peintres est transformée en centre d’études sur l’école de Crozant (Tlj 14h-18h jusqu’au 30 juin, en sept. et oct. ; 10h30-12h et 14h30-18h30 en juil. et août.)

À voir l'exposition « De vous à moi, Monsieur Monet », du 15 juin au 22 septembre, à la Station des Artistes / Conférence par le peintre Dominique Mantel « 1889 : Monet à Fresselines » organisée par L’œil et la Main le samedi 27 juillet à 15h30 à la Salle Polyvalente.

Étape gourmande

L'Hôtel-Restaurant Nougier, à Fursac (2 place de l’Eglise) constitue assurément l'hébergement de rêve attendu. Les chambres avec cachet attenantes à l’une des meilleures tables de la région en face du fleuve sont très confortables et paisibles. Bib gourmand au Guide Michelin élu « Table distinguée » perpétré sur 3 générations dans une élégante maison rénovée, accostée d’un joli jardin fleuri avec piscine ! La cuisine méridionale est à l’honneur comme le prouvent les recettes à base de légumes (herbes et épices équilibrant les plats et les saveurs), le tout présenté dans des assiettes en porcelaine de Limoges, ce pour magnifier le terroir creusois. L’atmosphère raffinée et conviviale garantie !

La Creuse, cette belle inconnue, est à visiter à pied ou à vélo. Elle se décline en heures plutôt qu'en kilomètres au point de vous transporter dans un autre temps.

Aller en Creuse

En train : De Paris Gare d’Austerlitz à La Souterraine / 2h45. En voiture : 3h de Paris, 5h de Genève.




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